Après notre article sur l’intérêt de faire vivre le consentement en colo, nous abordons à présent les conditions du consentement en ACM et l’impact sur nos organisations.
Les conditions du consentement
Il doit être clair, libre, éclairé et actualisé.
Nous souhaitons dans cet article questionner des pratiques que l’on croise en Accueil Collectif de Mineur·e·s (ACM).
Le droit des enfants à choisir leur activité
Beaucoup d’ACM indiquent comme volonté pédagogique “que les enfants soient acteurs de leurs vacances”. C’est une des grandes phrases de l’animation. Nous sommes en accord avec cette phrase. Mais elle implique une organisation pour être possible.
La plupart du temps, l’organisation du centre est la suivante : chaque anim propose une activité et les enfants choisissent parmi ces options. Selon la taille du centre, il y a plus ou moins d’options en parallèle qui sont proposées. Nous constatons que ces options sont rarement construites avec les enfants. De plus, les enfants n’ont pas connaissance de toutes les possibilités, à l’extérieur du centre ou dans le centre.
Et donc soit les enfants ne peuvent pas exprimer leur opinion soit leur opinion est biaisée par leur méconnaissance des possibilités. Je ne peux pas proposer d’aller faire un grand jeu dans le parc si je ne sais pas qu’on a le droit de sortir. Et si je veux aller voir un spectacle mais je ne sais pas qu’il a lieu ? Comment proposer une activité fabrication de boomerang si la scie à chantourner est bien cachée dans un placard avec un sens interdit dessus ?
C’est en connaissant tout l’éventail de possibilités que je peux m’exprimer. Sans cela, la condition du consentement éclairé n’est pas remplie.
Le droit des enfants à ne pas participer aux activités
Il y a de plus en plus d’ACM qui déclarent que les enfants ne sont pas obligé·e·s de participer aux activités. Nous nous en réjouissons ! Les enfants sont en vacances. Ils et elles ont le droit de ne rien faire ou de faire autre chose que les activités proposées.
Pour autant, nous avons conscience que ce n’est pas facile pour les enfants d’aller à la découverte de l’inconnu, de faire des activités qu’on n’a jamais faites. Il y a donc un vrai travail de la part de l’équipe d’animation pour susciter l’envie et la curiosité des enfants : montrer des modèles, en échanger avec les enfants en amont, regarder une vidéo tuto…
Mais quelle que soit la qualité du travail de l’équipe d’animation en amont, nous croisons régulièrement des équipes qui insistent lourdement auprès des enfants une fois qu’ils et elles déclarent ne pas vouloir participer aux activités « tu es sûr·e ? », « essaye d’abord et puis si vraiment, ça ne te plaît pas, on verra ».
Il peut y avoir plusieurs raisons à cela : organisation de l’équipe d’adultes, situation particulière d’un enfant, réelle déception de l’adulte d’avoir peu d’enfants…
Pour autant, il faut avoir conscience que dans ce contexte, les conditions du consentement clair et du consentement libre ne sont pas remplies.
Le droit des enfants à changer d’avis
Il arrive parfois qu’un enfant change d’avis. Un peu avant l’activité ou même pendant l’activité. Il faut pouvoir échanger avec l’enfant sur les raisons de ce changement d’avis. Nous avons peut-être la possibilité d’agir sur ces raisons. Par exemple, le sentiment d’échec, de ne pas réussir amène parfois l’abandon. C’est à nous les adultes de valoriser, accompagner l’enfant pour qu’il ou elle réussisse le projet .
Il faut également trouver l’équilibre entre le consentement et la notion d’engagement. Un exemple lors d’un séjour ado où les jeunes ont voulu organisé une séance de kayak.
Les échanges lors du conseil ont été longs : où, qui a envie de venir, qui se charge d’appeler le centre nautique… L’activité n’étant pas obligatoire, les jeunes qui ne veulent pas faire décident qu’ils et elles iront manger une glace. Les jeunes réservent la séance, elle aura lieu trois jours après.
Équilibrer consentement et engagement
Le matin même, finalement, trois jeunes changent d’avis et ne souhaitent plus faire de kayak. Après échanges avec les anims, on constate qu’un des jeunes a finalement envie de rester sur le camp pour “glander”.
Les deux autres ont leurs règles qui sont arrivées le matin même. L’une des jeunes n’a pas de tampon et refuse d’ailleurs d’en mettre. L’autre nous informe que “c’est mort, j’ai tellement mal, je ne peux vraiment pas faire de kayak”.
Notre réaction n’a pas été la même avec les trois. Nous avons rappelé au jeune qui voulait rester sur la camp qu’il s’était engagé. Son désistement a des conséquences sur le groupe et sur le centre nautique. Il a accepté de venir (évidemment, s’il avait insisté, il serait resté sur le camp). Nous avons pu rassurer la jeune qui refusait de mettre des tampons et lui avons proposé une alternative. Nous connaissions le centre nautique, il y a des cabines de douche privatives. Elle a pu mettre une culotte menstruelle, rassurée à l’idée de pouvoir se changer ensuite. Quant à la dernière, évidemment, elle a pu venir manger une glace !
Refuser que les enfants changent d’avis, quittent la salle d’activités avant la fin, sans chercher à comprendre les raison nous pose problème. De fait, les enfants ne peuvent pas actualiser leur consentement.
Faire vivre le consentement en ACM, une organisation à part entière !
Nous défendons les ACM qui respectent les enfants. L’organisation de nos ACM doit faciliter la vie des enfants, pas des adultes ! Quel message renvoyons-nous aux enfants quand on ne prend pas en compte leurs opinions, leurs avis, leurs ressentis ? Comment leur faire croire qu’ils et elles ont le droit de dire non si ce même non n’est pas pris en compte dans les aspects plus anodins de sa vie ? Énoncer la règle ne suffit pas : il faut faire vivre le consentement en ACM, y compris dans nos organisations !
Plusieurs pédagogues ont critiqué le modèle dominant d’organisation des centres de loisirs et des colos, appelé le modèle colonial1. Toustes En Colo en ont fait un article, si vous voulez en savoir plus.
1 Colonial pour colonies de vacances. Rien à voir avec le colonialisme !
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